Terrain.s


2018-22
avec Roger Rousseau — le terrain — et Bruno Almosnino — textes —



Roger Rousseau, depuis 1995, dégage, à la main, le substrat d’un terrain qu’il a acquis sur un causse du Quercy dans le Lot (46). En creusant, il démoule de l’argile un ensemble de grandes dalles rocheuses naturellement enfouies, datant de plus de 150 millions d’années. Dans un geste artistique et de filiation vernaculaire, il délimite cette découverte par la réalisation en pierre sèche, de murs, d’escaliers, de sièges et couloirs.

Avec “le terrain” - c’est ainsi qu’il le nomme -, il crée un paysage dans le paysage, un land-art. À l’importante différence près, qu’il habite les lieux. Son geste est sa vie, bientôt trente années qu’il se poursuit dans cet ici et dans un présent continu. Pour Roger Rousseau, le terrain n’est pas la matière première et utilitaire à une “oeuvre” mais la matière sacrée à nos existences. La peur de la mort, l’informe, le secret, la terre-mère, la naissance des écritures, l’histoire de l’art, les rencontres avec l’invisible, les images multiples hallucinatoires. Le terrain est une puissante contestation de « l’ordre établi » et une tentative de reprise de pouvoir sur des appareils culturels et des institutions (musées, grottes, phosphatières, géoparcs, etc) nous empêchant de reprendre contact avec un sol, des histoires, des imaginaires, une mémoire archaïque et collective.

Terrain.s est un ensemble de portraits : de photographies de paysages au format portrait. Des paysages avec torse, os, patte de cheval, pied d'éléphant, faunes océaniques, reptiles, buste romain, gueule de singe. Un ensemble de paysages, un cosmos souterrain, qui forment le portrait en creux d’un humain. Un ensemble de photograhies qui montrent des failles, des lignes, des trous, l’image-mémoire d’une longue histoire des formes, de la figuration et des représentations, l’image-miroir de mondes enchantés et enfouis.

 


                 



Relevé de terrain #2
Prélèvement d’une paroi, feutre sur rhodoïd puis transfert sur calque, crayon, 2019   












Terrain.s, 176 pages, 17x24cm, est paru en novembre 2022 aux éditions Arts Pauvres, avec le soutien des musées Fenaille (histoire et préhistoire du Rouergue) et Denys Puech (Beaux-arts) de Rodez (12), la Maison des Arts Claude et Georges Pompidou de Cajarc (46), le laboratoire d’anthropologie Le Mirail, projet ANR- 11-LABX-0066  « Pierres Vivantes. Une anthropologie du Vivant au prisme des pierres » (31, fr), l’association TUSITALA, ethnologie, création, cinéma (31, Fr)

Un folio est à paraître dans la revue Tecniques & cultures, n°79 “Suivre les pierres” aux Éditions de l’EHESS, printemps 2024, dirigé par Ludovic Coupaye, Nicolas Adell,  Laurence Charlier-Zeineddine